Aude Réco J’ai décidé de reprendre depuis le début ma lecture de Libérez votre créativité, de Julia Cameron. (Abandonnée il y a quelques années par manque de temps.)
La période me semble bien choisie. Novembre et décembre sont deux mois calmes (le premier consacré à l’écriture avec le NaNoWriMo, le second aux vacances), et janvier est toujours hyper motivant.
Avant d’aller plus loin, si vous aussi, vous souhaitez découvrir ce livre et tous les exercices dont il regorge, veillez à être dans le bon état d’esprit. (Si vous déprimez, c’est une mauvaise idée, car, de souvenir, certains exercices interrogent ce qu’on ne veut pas forcément voir et l’exploration de ce livre demande du temps.) Ceci étant dit, commençons par un petit avertissement.
Des allusions qui desservent le propos
Libérez votre créativité, c’est du développement personnel dans sa plus pure tradition New Age. C’est, à mon sens, le gros point noir de ce livre : les allusions à Dieu. Partout. Tout le temps. À peine déguisées ou carrément frontales. Des allusions à l’univers, à certaines forces, à une « Puissance Suprême » (avec des majuscules, oui, oui), au « Grand Créateur »…
Ceci est un problème dans le cadre du développement d’une créativité saine
Avec ces allusions, le problème (car, oui, j’estime qu’il s’agit d’un problème) n’est pas tant d’évoquer Dieu ou une quelconque figure divine, quel que soit le nom qu’on lui donne. Chacun·e est libre de croire qu’une entité dite supérieure gouverne ses choix et ses actes. (Tant que ces pensées ne deviennent pas dangereuses.) Mais pas quand on veut « enseigner la créativité » parce qu’alors, c’est dire à des artistes en panne qu’ils devraient croire en cette espèce de force cosmique pour relancer la machine. À mon sens, croire en soi serait déjà un bon début.
Compliquer la créativité
Reporter sa créativité sur une quelconque figure divine, c’est compliquer cette créativité et notre rapport à elle. (Déjà chaotique, bien souvent – cf. la procrastination et notre rapport au temps.) C’est aussi impliquer une force extérieure que l’on ne contrôle pas.
Désacraliser l’écriture
La créativité n’est pas quelque chose de sacré. C’est justement en la considérant comme telle que l’on n’ose pas. (Utiliser un nouveau carnet de peur d’en gâcher les pages, par exemple.)
Parler de « forces créatrices » revient, dans certains cas, à favoriser des blocages. Encore une fois, la peur de se tromper, de mal faire. Or, créer, c’est aussi se tromper, c’est apprendre, et il n’y a pas d’apprentissage sans erreurs.
D’accord, quand on crée, des éléments extérieurs viennent faciliter ou perturber le processus créatif. (Comme les émotions.) Mais on ne peut pas, pour autant, s’en remettre à la seule motivation. (Qui est l’un des grands mensonges du développement personnel.) On crée pour apprendre. On apprend pour créer. (Du moins, la technique.)
Il n’y a pas d’apprentissage sans erreurs
« Pourquoi ai-je dû apprendre ce que j’ai appris comme je l’ai appris : » (cette phrase est épouvantable, non – ou sa traduction ?) « par essais et erreurs, en me cognant aux murs ? »
L’autrice, ici, résume parfaitement ce que n’est pas la créativité. (Et, partant de ce constat, j’ai un peu plus de mal à la prendre au sérieux.) Car, même avec le plus complet des manuels, les erreurs sont de la partie. Quant aux essais, si je ne m’y laissais pas prendre de temps en temps, je n’aurais jamais écrit Ocre rouge.
(Je vous retrouve la semaine prochaine pour l’épisode 2 de cette série.)
