GÉRER L’ÉMANCIPATION DE SES PERSONNAGES

Gérer l’émancipation de ses personnages est un travail à temps plein pour certains auteurs et certaines autrices. Des personnages qui n’en font qu’à leur tête au point d’aller vivre leur propre vie.

Avec l’auteur Julien Morgan, nous avons essayé de comprendre comment les personnages peuvent à ce point échapper à leurs auteurs et autrices. (Le live est disponible en replay, bien sûr.)

Un plan pour gérer l’émancipation de ses personnages ?

Qui dit écriture d’un roman dit minimum de préparation, que l’on soit architecte ou jardinier. L’architecte sait d’avance où iel va à des niveaux parfois imbattables d’organisation. Les jardinier·ère·s sèment leurs graines, mais, a priori, savent ce qu’iels sèment (comme l’a si bien souligné Julien dans le live). Architectes comme jardinier·ère·s maîtrisent donc un minimum leur intrigue, leur histoire (c’est-à-dire la manière dont iels vont raconter l’intrigue et ses péripéties) et leurs personnages.

Dans un tel schéma (même le moins construit possible), gérer l’émancipation des personnages devrait se résumer à un léger changement de trajectoire pour le bien de l’intrigue ou celui des interactions entre les personnages. Mais non, alors, nous avons approfondi la conversation.

La manière de travailler et celle de raconter

Être architecte ou jardinier·ère, c’est un peu (beaucoup) la manière qu’a chaque auteur ou autrice de travailler : un plan hyper construit, des fiches pour les personnages, d’autres pour les lieux, des scènes préparées à l’avance (ce que je fais systématiquement), un plan minimal, une liste de scènes importantes… Chacun·e puise finalement dans ce qui lui est nécessaire pour s’investir au mieux dans l’écriture de son roman. Et, au fil de nos réflexions pour gérer l’émancipation de ses personnages, j’ai repensé au problème majeur des fiches-personnages.

Le problème des fiches-personnages

J’avais déjà évoqué ce problème dans une vidéo, avant de proposer, sur ma chaîne YouTube, un tuto pour créer une fiche-personnage utile. (Tutoriel accompagné de mon modèle de fiche-personnage à télécharger.)

Je pense qu’il est important de gérer l’émancipation de ses personnages avant qu’ils s’émancipent, c’est-à-dire d’anticiper cette étape. Une fiche-personnage solide s’intéressera moins aux caractéristiques physiques de vos personnages qu’à leur place dans votre intrigue : ce qu’ils représentent, les actions qu’ils mènent, les messages qu’ils font passer… Un personnage qui s’émancipe est un personnage qui a autre chose à raconter, une autre place à occuper dans l’intrigue. Cette place est à attribuer avant l’écriture de votre roman. Les actes de votre personnage, son caractère et les réactions qui en découleront, ses doutes, ses convictions… Demandez-vous pourquoi votre personnage occupe cette place. Un autre personnage ne l’occupe-t-il pas déjà ? Quel lien votre personnage a-t-il avec l’intrigue, l’antagoniste, le contexte ? Quelle est son utilité dans votre intrigue ?

Élaborer l’intrigue et raconter l’histoire

Et l’intrigue, parlons-en. L’histoire aussi. Car intrigue et histoire sont bien différentes l’une de l’autre. L’intrigue est le squelette. L’histoire est la manière dont vous racontez l’intrigue, dont vous animez ce squelette.

Dès lors que l’on confond intrigue et histoire, gérer l’émancipation de ses personnages devient un casse-tête, car

  • on s’y perd dans leur évolution
  • on se base sur du factuel (tel personnage servira telle action à tel moment de l’intrigue), mais notre démarche pour le romancer est incertaine
  • on sait où l’on va, mais pas de quelle manière (et c’est pareil pour les personnages).

Connaître les éléments de votre intrigue, mais pas la façon dont vous les amènerez est hasardeux, et une intrigue qui fonctionne ne laisse jamais rien au hasard.

Ne pas confondre premier jet et laboratoire de travail

Le meilleur moyen de gérer l’émancipation de ses personnages est, nous l’avons vu, d’anticiper cette émancipation. Un personnage, ça se prépare. Peu importe que vous fassiez connaissance avec lui dans votre tête au fil des idées, en répétant des dialogues sous la douche ou en notant absolument tout. Apprenez simplement à le connaître. Préparez le terrain.

Votre premier jet n’est pas un laboratoire. (Là, je reprends l’idée de Julien, que je trouve excellente.) Vous pouvez, bien sûr, y intégrer des personnages au hasard et découvrir le résultat, mais ne vous attendez à rien de très construit (sauf si vous avez de la chance et/ou que vous vous connaissez assez pour vous le permettre). C’est un risque que vous n’avez pas forcément envie de courir (avec les corrections interminables, voire une réécriture).

Tous les détails de notre conversation avec Julien Morgan sont disponibles dans le replay. Je n’ai cependant pas pu tout retranscrire, alors, rejoignez L’Écriturienne afin de récupérer votre mini-cours vidéo ce dimanche !

Gérer l'émancipation de ses personnages
Gérer l'émancipation de ses personnages

Aude Réco

Je suis autrice dans les genres de l’imaginaire à destination des adultes et des jeunes adultes.

Je suis adepte de méli-mélo temporel, de mondes aux contrées mystérieuses et, surtout, de maisons hantées et d’histoires de fantômes.
J’aime tout ce qui touche au passé et à la mémoire des lieux, aux secrets de famille et vieilles malles poussiéreuses pleines de souvenirs.

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