Il y a peu, je vous parlais, ici même, de l’importance du cadre dans le genre fantastique. Aujourd’hui, il me paraissait intéressant d’évoquer la place de la peur dans ce même genre, laquelle évolue au fil du roman entre l’atmosphère (le cadre, donc) et les diverses interprétations qu’en font les personnages. (Une ombre sur un mur, le souffle du vent qui s’apparente à un cri, la pluie qui semble frapper à la fenêtre…)
Dans Les Murmureurs, mes personnages redoutent l’inexpliqué, à savoir des disparitions d’enfants près d’un isthme qui suscite une peur irraisonnée. Comme je joue sur les conséquences, notamment psychologiques, de la guerre sur eux, les démons intérieurs de chacun et l’ombre d’un corbeau qui plane sur le village, l’inexpliqué peut aisément passer pour de la réinterprétation de la part des personnages. C’est ce que j’appelle le pouvoir de l’imagination, lequel en appelle aux émotions négatives. (Je vous reparle très vite des émotions dans le fantastique.)
Les angoisses, les phobies, l’ombre qui grignote le peu de lumière qui subsiste, les bruits de pas dans notre dos, le cœur qui bat à tout rompre… Tous les moyens sont bons pour décrire la peur, pour l’installer et, surtout, pour troubler personnages et lecteur·rice·s.
Le roman est disponible en précommande au format papier et dédicacé (19 €, frais de port inclus), ainsi qu’en numérique (ePub et .mobi) sur mon Patreon.
— Je dois vous parler, l’informa Matthew en changeant brusquement de sujet.
Les Murmureurs, pages 140-141.
Il fronça les sourcils.
— Ça ne va pas ? s’enquit-il enfin.
— Je…
Edward ne trouvait pas les mots. Interdit, il resta planté là, dans l’entrée.
— Edward ?
Son hôte voulut approcher ; Ed le repoussa sans conviction. Il devenait fou. Voilà. Il inventait des détails qui n’existaient pas, sans doute pour essayer de reporter son stress ailleurs.
— Edward, parlez-moi. Vous me faites peur.
La voix de Matthew, désormais emplie de compassion, rappela Ed dans cette réalité qu’il fuyait.
— Eh, murmura-t-il en lui prenant la main.
Edward le laissa faire, incapable de protester ou de refuser le soutien qu’il lui apportait. D’autre part, il ne pouvait pas rester fermé comme une huître. Ce n’aurait pas été leur rendre service.
— C’est bien, l’encouragea Matthew. Je vous tiens compagnie.
— Vous aviez sans doute à faire.
— Les feuilles mortes ne s’envoleront pas. Enfin, ça m’arrangerait que le vent les pousse chez le voisin, pour m’éviter de les ramasser.
Il lâcha un petit rire supposé détendre l’atmosphère. Edward se laissa prendre au jeu.
— Vous deviez me parler, rappela-t-il tandis qu’ils rejoignaient le salon.