Je vois souvent passer des demandes pour débloquer son manuscrit. Tandis que certain·e·s s’attachent à de la technique pure et dure, moi, depuis des années, j’opte pour trois fondamentaux davantage liés à l’état d’esprit. (À mon sens.) Pour découvrir lesquels, c’est dans l’article !
L’importance de s’épanouir
Dans mon introduction, j’évoquais la technique, à laquelle s’attachent certain·e·s vaille que vaille. Je trouve, cependant, que l’on ne prête pas assez d’importance à l’auteur·rice derrière le texte en cours d’écriture. On parle toujours de règles, de conseils pour la mise en forme, les descriptions, l’introduction des personnages…, mais quid de l’épanouissement de l’auteur·rice ? (Et, si vous suivez Créactivité, mon podcast qui s’intéresse plus à l’humain et moins à la technique, vous savez que c’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur.)
L’épanouissement est à percevoir comme un moteur, non comme un but à atteindre.
On envie souvent celleux qui aiment vraiment leur boulot, qui s’y investissent de bon cœur et prennent un plaisir fou à développer leur projet. Dites-vous que ce plaisir est à votre portée grâce au projet dans lequel vous vous êtes engagé·e. Vous êtes libre de respecter vos limites et vos besoins, de suivre vos envies, de poser vos propres contraintes… et de prendre votre temps. Celui de vous épanouir, notamment.
L’épanouissement est à percevoir comme un moteur, non comme un but à atteindre.
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Du bien-être dans votre projet dépendra la qualité de votre investissement. Pour débloquer son manuscrit, il faut s’y investir et en avoir envie. Si vous ne vous investissez pas dans votre projet, il n’évoluera pas, et vous aurez l’impression (vérifiée) de stagner. Ce n’est pas ainsi que l’on s’épanouit dans son projet, encore moins que l’on peut débloquer son manuscrit. Il n’existe pas de recette miracle, évidemment, mais vous vous investirez difficilement dans un projet qui vous fera vous sentir mal, qui vous enfermera dans une case, vous donnera du fil à retordre…
Je dis souvent que le développement de son projet est une façon de participer à son propre développement. Immanquablement, il passe par les doutes et la comparaison aux autres.
Affronter seul·e ses doutes
L’écriture est souvent qualifiée d’acte intime et solitaire. Dans l’imaginaire collectif, écrire un roman se résume à s’installer à son ordinateur (ou son bloc-notes, son carnet…) et enchaîner sur des kilomètres de mots, de phrases, de pages… jusqu’au jour où le bébé est terminé. Tout ceci se déroule dans la plus stricte intimité du bureau, bien sûr. Eh bien, c’est faux ! Évidemment, certain·e·s préfèrent travailler seul·e, mais d’autres s’organisent des sessions d’écriture collectives, IRL ou en ligne, des sprints, se lancent des défis… Parfois, une conversation lambda peut aider à débloquer son manuscrit.
L’écriture est, dans le plus strict sens du terme, un acte intime, en effet. Parce qu’on y met de soi-même, de ses expériences, de ses ressentis, de ses combats, parfois… Mais, solitaire, ça, c’est à chacun·e de décider.
Ceci pour dire que tu n’as pas à vous imposer d’écrire dans votre coin, encore moins à affronter seul·e vos doutes. Si vous le faites dans un souci du paraître, parce que « l’écriture est un acte intime », c’est d’autant plus une erreur, car vous vous forgez sur une idée faussée du métier d’auteur·rice. Mais peut-être que votre perception du métier ne provient pas que de son intimité sur-évaluée ou de sa solitude supposée, plutôt de votre vision des autres, difficilement intégrables à ce que j’appellerai votre bulle. (Soit votre espace de travail, ce qu’il se passe exclusivement entre vous et votre texte en cours.)
S’aligner sur les performances des autres
Se comparer aux autres est foiré d’avance pour plein de raisons. La première, c’est que chacun·e est différent·e. On n’a pas la même expérience, le même rythme ni la même conception du métier d’auteur·rice. Se comparer aux autres, c’est mettre tout le monde sur un pied d’égalité, et, ça, ce n’est clairement pas le cas. Le comprendre peut, aussi, aider à débloquer son manuscrit.
Se comparer aux autres, c’est oublier qui l’on est : une personne à part entière avant d’être un·e auteur·rice, et on est d’accord que l’on ne peut pas devenir quelqu’un d’autre. Ce n’est pas la personne qui fait l’auter·rice, mais l’auteur·rice qui se fait, qui se façonne. Iel apprend de qui iel est, bien sûr, puise dans ce qu’iel connaît… (D’ailleurs, ne conseille-t-on pas aux apprenti·e·s auteur·rice·s d’écrire d’abord sur ce qu’iels connaissent ?) Moi, si je devais leur donner un conseil, ce serait celui de se connaître soi-même avant d’envisager connaître quelqu’un d’autre, sous-entendu, ici, ses personnages.
L’auteur·rice est une variable dans l’écriture d’un roman. Selon ce qu’iel ressent, le texte empruntera une direction différente. Selon s’iel se sent moins doué·e que les autres, iel le traduira à travers son roman, il transmettra son ressenti, et, alors, ce texte perdra de sa force initiale s’il en possédait une. (C’est de l’auto-sabotage, en fait.)
On n’est pas quelqu’un d’autre, donc.
Penser à s’aligner sur les autres, c’est voir le problème à l’envers, c’est croire qu’on est, soi-même, le problème, alors que, clairement, il se trouve dans notre vision de nous-même, dans la façon de nous poser par rapport aux autres, à leurs accomplissements, mais, aussi, à ce qu’iels partagent sur leurs réseaux sociaux. (Vous savez, quand on montre que tout va bien, même si ce n’est pas le cas ?) Les réseaux sociaux ont cette capacité à déformer la réalité, de par la volonté qu’y ont les utilisateur·rice·s à paraître sous leur meilleur jour.
Écouter aussi “Être toujours au top ?” sur votre plateforme d’écoute habituelle ou YouTube.
Quand on cherche à s’aligner sur les performances des autres, on tente, surtout, de s’aligner par rapport à un contenu qui nous est proposé, voire amélioré. C’est comme essayer d’atteindre une beauté parfaite en s’appuyant sur un modèle archi-photoshopé. Ça ne peut pas fonctionner, parce que l’un·e n’est pas l’autre, parce qu’on tou·te·s nos hauts, nos bas, nos difficultés et nos doutes… parfois joyeusement entretenus par le syndrome de l’imposteur.
On n’est pas quelqu’un d’autre.
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Apprendre des autres est un atout
Être avec les autres, plutôt qu’en comparaison, voire en opposition, constante avec elleux n’est pas tourner le dos à ce qui fait le métier d’auteur·rice (ou l’idée que l’on en a) ou à l’écriture, y compris dans une perspective non professionnelle. Côtoyer les autres auteur·rice·s n’est pas risquer de compromettre son inspiration. Rien ne sert de comparer. L’écriture créative n’est pas un concours de celui ou celle qui écrit le plus vite ou le plus de mots dans un roman, dans un chapitre… On n’a rien à apprendre à se comporter ainsi, qu’il s’agisse de comparaison ou de jalousie. Par contre, apprendre des autres est un atout.
Ces doutes qui nous envahissent, d’autres les ont déjà éprouvés. Si vous ne vous interrogez pas, vous n’évoluez pas ou pas de la même façon. Quand on écrit, on se pose forcément tout un tas de questions.
Et débloquer son manuscrit, dans tout ça ?
Simple. Enfin, façon de parler. L’écriture d’un roman est intimement liée à son auteur·rice, et, dans cet article pour débloquer son roman, j’ai donné plusieurs pistes pour favoriser l’épanouissement, le partage des doutes et la fin de la course à la performance. Ces trois fondamentaux (toujours à mon sens) ne sont pas faciles à mettre en place, j’en suis consciente, mais se révèlent ô combien plus précieux que n’importe quelle technique que l’on appliquera par nécessité, plutôt que par intérêt.